L’art sur les murs

Catégorie: Art & culture 27 mai 2015
Lavapiés

Lavapiés

La première exposition-rétrospective de l’artiste madrilène Suso33 (l’une des stars mondiales du street art et précurseur du graffiti iconographique) me rappelle que Madrid, et en particulier le quartier de Lavapiés, est aussi le réceptacle de ces interventions urbaines singulières… Petit tour en mots et surtout en images dans ce quartier haut en couleur.

« Pour moi, la ville est comme une scène de théâtre, un espace où les gens nouent des relations, où il se passe de bonnes choses, de mauvaises aussi… Je me sens comme un “constructeur” de ville,  un constructeur d’environnements et d’émotions« . Suso33 décrit ainsi sa relation d’artiste urbain avec Madrid.  En 2013, dans le cadre de son projet de récupération d’espaces urbains, le Département des Arts de la mairie de Madrid lui passe commande d’un mural gigantesque qu’il peint sur l’un des murs de soutènement d’un immeuble du quartier de Tetuán où l’artiste a passé son enfance.  Mais Suso33, comme tous les “graffeurs de l’ombre”, s’amuse aussi à semer des signatures illicites un peu partout dans la ville, qui, dans certains endroits, n’ont pas d’autre choix que de disparaitre sous les coups de Karsher des services de nettoyage municipaux.

Suso33

Suso33

Dans le quartier de Lavapiés, par contre, les murs accueillent volontiers ces illustrations spontanées et éphémères. Le marché animé de San Anton marque le départ d’une route du graffiti que l’on peut faire seul où en compagnie de l’agence Street Art Madrid qui organise des safaris urbains pour faire découvrir Madrid à travers le travail sans cesse renouvelé d’artistes urbains. Au premier étage du marché, le portrait géant d’une belle danseuse signale la présence de l’école de flamenco Amor de Dios (toute une institution en Espagne!). On s’engouffre ensuite dans les ruelles de Lavapiés comme on s’aventurerait dans une BD. Calle del Olmo, un gros coeur rouge se cache dans l’entrée d’un garage… Plus loin, dans la Calle Calvario, une drôle de pieuvre jaune nous jette un regard interloqué.  Attention aux vrais faux panneaux de signalisation : certains ont pas mal d’humour! Il faut aussi chercher les créations singulières de Nuria Mora qui habillent les murs et les portes condamnées de fleurs et de cristaux colorés. Même les commerces ont eu recours à ce genre d’art iconographique pour mettre un peu de couleur sur leurs stores métalliques.

Tabacalera

Tabacalera

De la couleur, Lavapiés n’en manque pas! Quartier cosmopolite par excellence, on y trouve des épiceries exotiques et des restaurants du monde, des petites galleries d’art et des théâtres alternatifs, des cafés populaires et quelques tablaos flamencos purs jus tel que le Bar Candela. Traditionnellement, il a toujours été un quartier qui accueillait les populations immigrantes, du reste de l’Espagne d’abord et d’autres horizons ensuite. D’ailleurs, autour des places de Lavapiés et dans la Calle del Amparo, il reste encore de beaux exemples de corralas, ces édifices de logements populaires, unis par des galeries communes où le linge est mis à sécher. Historiquement rebelle, le quartier de Lavapiés s’inscrit dans une culture résolument underground et participative. Le Casino de la Reina (construit en 1809) a été transformé en centre social qui offre de nombreuses activités culturelles pour les habitants du quartier. De même, l’ancienne fabrique de tabac Tabacalera est aujourd’hui un centre d’exposition et de spectacles, avec un espace auto-géré qui abrite un potager citoyen, un atelier de réparation de bicyclette et un marché d’artisanat, entre autres. Tabacalera a aussi fait l’objet du plan de récupération des murs de Madrid: 32 artistes urbains ont eu à charge de décorer les murs extérieurs de l’édifice que l’on peut admirer de la Calle Miguel Servet, une autre petite rue bien agréable avec ses petits restos de cuisine étrangère et ses terrasses de cafés.

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