Le printemps est certainement l’une des saisons où Madrid est le plus à son avantage. Ses 21 000 hectares d’espaces verts se couvrent de fleurs et de verdure, et la température est idéale pour faire une pause bucolique dans l’un de ses plus beaux jardins historiques: le Jardin du Caprice.
Saviez-vous que la capitale de l’Espagne est l’une des villes les plus vertes d’Europe? Pas un quartier sans son petit jardin croquignolet ! La plupart de ces espaces verts publics sont les vestiges d’anciennes possessions royales ou de l’aristocratie madrilène des siècles passés. Aujourd’hui, je choisis donc de visiter le Jardín Histórico del Capricho (le Jardin Historique du Caprice), un petit joyau botanique juste à la lisière du centre-ville. Il fut l’œuvre de Doña María Josefina de la Soledad de la Portería Alfondo Pimentel (1752-1834), épouse du 9° duc d’Osuna (rien que ça !).
Cette noble dame, comme nous l’apprend notre sympathique guide, se passionnait pour la botanique et les courants naturalistes de l’époque (notamment l’œuvre de Jean-Jacques Rousseau). Elle fit appel à des scénographes et des paysagistes de renom tel Jean-Baptiste Mulot (qui avait travaillé à la conception du Petit Trianon) pour se faire construire son petit Versailles particulier : « la duchesse voulait voir refléter dans son jardin ses idéaux philosophiques et en faire un espace de villégiature pour elle est son entourage», précise la guide. Plus qu’un jardin précieux, le Caprice est donc avant tout un musée parsemé d’œuvres d’art, de symboles et de références littéraires, que l’on visite comme on résoudrait un jeu d’énigmes.
Dans le jardin d’inspiration italienne, un labyrinthe taillé dans les buissons de laurier évoque le mythe d’Apollon et de Daphné . Un peu plus loin, deux statues, se tournant le dos, symbolisent la dualité, tandis qu’un rosier pompon jaune, qui prend d’assaut un mur en ruine, représente le triomphe de la vie sur la mort. En cette saison, le jardin est tout simplement splendide et embaume le seringua et le lilas, la fleur favorite de la duchesse de Osuna. De vastes pelouses veloutées alternent avec des parterres de capucines, cyclamens rouges, fraisiers sauvages, bouquets de lys bleus ou pensées multicolores, qui prolifèrent dans les sous-bois, à l’ombre d’innombrables essences locales et exotiques. Au détour d’un sentier ourlé de violettes, on tombe sur une curieuse pagode chinoise toute en bambou qui se mire dans les eaux d’un petit lac ou nage silencieusement un beau cygne noir…
La maison de bambou n’est que l’une des diverses constructions singulières que l’on découvre au cours de notre promenade : ici, une maison pour les abeilles (unique en son genre), plus loin, un fort en miniature, puis un temple en l’honneur de Bacchus et un palais-casino. La présence incongrue de plusieurs bunkers rappelle qu’à l’époque de la guerre civile, les républicains avaient installé leur quartier général dans le Capricho. En sortant, on s’arrête une dernière fois pour regarder la casita de la vieja (la maison de la vieille), une « chaumière de poupée » digne des meilleurs décors de contes de fées… D’ailleurs, en parlant de décor, le Jardin du Caprice a servi plusieurs fois de lieu de tournage, notamment pour une scène du Docteur Jivago, romantisme oblige.
La liste des principaux parcs et jardins publics de Madrid, ainsi qu’une carte bien pratique pour les localiser, est disponible en cliquant sur ce lien.