Aujourd’hui, je vous invite à me suivre dans un singulier marathon gastronomique, à la découverte de quelques-unes des spécialités culinaires les plus autochtones et populaires de la capitale, dont le dénominateur commun est de cuire dans une abondante quantité d’huile. Âmes “cholestérophobes”, s’abstenir !
En dépit d’un veranillo de San Martín (été indien) fort providentiel – qui a encouragé les cafés à remettre leur terrasse à l’air jusqu’à nouvel ordre glacial – je vous invite à une dégustation commentée de quelques-uns des plats de friture les plus célèbres de la capitale qui donnent bien chaud quand l’hiver pince (et ici, il pince bien!).
Eh oui, à Madrid, on aime ça quand ça croustille ! Il faut dire que la ville en a toujours eu les moyens : les nombreuses oliveraies que l’on retrouve dans certains parcs publics tel le Parc Juan Carlos I, sont témoins de l’importante tradition oléicole de Madrid depuis le XVème siècle. Aujourd’hui, la région de Madrid produit en moyenne 3 400 tonnes d’huile d’olive à l’année grâce a quelque 24 000 ha de culture de l’olivier, d’après les chiffres du ministère espagnol de l’Agriculture. Il existe même une A.O.C. Huile de Madrid.
Mais revenons à notre route gourmande. Démarrons la journée avec le plus traditionnel des petits-déjeuners espagnols : les churros (fameux beignets filiformes, probablement d’origine séfarade…) et le chocolate a la taza (chocolat chaud très épais). Je me rends pour cela à La Antigua Churrería (située au numéro 190 de la rue Bravo Murillo). Fondée en 1913, c’est la véritable fabrique de churros traditionnelle et familiale qui prépare sa propre pâte à churros tous les jours et la frit dans de l’huile propre et renouvelée quotidiennement. Pour la modique somme de 2,50 euros, on me sert sur le moment une bonne tasse de chocolat épais et quatre churros brûlants et croustillants, fraîchement sortis de la friteuse. Un délice !
Pour contrebalancer l’apport calorifique, je décide de me rendre à pied à ma prochaine étape… Trois kilomètres et demi plus loin, je rejoins un ami à la Casa Julio, le temple de la croqueta, situé au numéro 37 de la rue Madera, en plein quartier de Malasaña. Bien qu’un grand classique des cartes de tapas madrilènes, la croqueta serait attribuable au cuisinier français Marie-Antoine Carême (1784-1833)… Vrai ou pas, Luis Torres, le patron de Casa Julio, lui fait honneur ! Je choisis la sélection de six croquetas au boudin et pâte de coings, aux épinards, raisins secs et fromage gorgonzola, au jambon, aux champignons et poireaux, au hachis de viande et au thon avec de l’œuf et des oignons caramélisés. Mon ami commande un pisto con huevo, une ratatouille servie dans sa « cazuela » en terre cuite et couronnée d’un œuf frit.
On prendra bien un petit dessert, allez, d’autant plus que nous sommes en période de Toussaint. C’est le moment de déguster les buñuelos de viento, littéralement les « beignets de vent ». Avec un nom aussi poétiquement éthéré, ça ne peut pas faire de mal. Cap sur l’une des pâtisseries les plus vieilles de Madrid : la Antigua Pastelería del Pozo. L’une de ses spécialités sont les beignets de vent, cuits dans un bain d’huile avant d’être fourrés à la crème pâtissière, au chocolat, au café, et même à la crème de patate douce (une singularité de cet établissement).
Et on ne pourrait pas terminer notre route sans déguster le fameux sandwich aux anneaux de calamars frits, l’une des spécialités de la cuisine de bistrot madrilène. C’est la star de El Brillante, un bar à l’ambiance bien popu, où il est permis de joncher le sol de papiers (gras, eux aussi) régulièrement balayés par une armée de serveurs sympas et rigolards. On fait descendre ce met un tantinet bourratif avec un verre de bière. Allez, c’est promis, demain, on se met au régime.